La fraude corrompt tout même le recours contre l’assureur du responsable
Dans un arrêt très intéressant de la Cour de Cassation Chambre Civile 3eme du 14 septembre 2023, deux particuliers avaient confié la maitrise d’œuvre complète pour la construction d’une maison d’habitation à la société Les Maisons NEMA assurés en responsabilité décennale auprès de la compagnie AREAS. La maison avait été réceptionnée sans réserve mais un défaut d’altimétrie les privant de l’accès à leur garage en est résulté par la suite. Les maitres de l’ouvrage ont par LRAR saisi l’assureur AREAS qui avait décliné sa garantie au motif que le défaut était apparent sans être toutefois réservé. Nous n'avons pas connaissance de quelle type de véhicule il s'agissait, ni de combien de mètres il manquait.
Quoiqu'il en soit, c’est ainsi que les maitres de l’ouvrage n’ont assigné que la société de maîtrise d'œuvre, laquelle, sans avoir constitué avocat, a été condamnée par jugement du TJ de Rennes en date du 30 mai 2017. La société Maisons NEMA ayant été radiée du RCS, M. et MME ont donc imaginé d'assigner en paiement la société AREAS qui n’avait pas été mise en cause dès le départ. Celle-ci a formé tierce opposition au Jugement rendu précédemment lequel a été réformé de sorte que l’ensemble des demandes des maitres de l’ouvrage ont finalement été rejetées.
Ce qu’il faut retenir : Le jugement de condamnation d’un assuré est opposable à son assureur car lorsque l’assuré est condamné le risque réalisé est couvert. Cette décision de condamnation de l’assuré est donc décisive.
MAIS : Cette condamnation de l’assureur a toutefois une limite c’est la fraude. Cette fraude ne peut se déduire de la seule absence d’appel en cause de l’assureur. Cette fraude peut provenir autant de l’assuré que du tiers lésé. Ici les MO connaissaient la position de non garantie de l’assureur en raison du caractère apparent du désordre et avaient volontairement omis de l’attraire en la cause, tandis qu’ils savaient également de la société maitrise d’œuvre mal en point n’allait pas constituer avocat ni moyens soulevés. Les Juges du fond doivent bien caractériser cette fraude aux droits de l’assureur, ce que la Cour de Cassation devra vérifier. On peut se demander quelle aurait été la décision si le risque avait pû valablement être pris en charge sans que le maitre de l'ouvrage n'assigne au départ l'assureur par crainte de rallonger la procédure ou de se voir opposer des contestations infinies de nature à alourdir la procédure ... il peut être tentant de n'assigner qu'un seul défendeur dont on sait qu'il ne prendra aucun avocat par soucis d'économie.
Le jugement de condamnation d’un assuré est opposable à son assureur car ainsi, le risque est réalisé mais ne sera couvert par l'assureur que si ce risque peut être pris en charge.